Ce carnet est dédié aux approches féministes des sciences et des technologies. Son premier objectif est de rendre accessible, en français, les travaux étudiant la construction mutuelle du genre et des objets techniques, et considérant la technique et le genre comme des processus sociaux enchevêtrés et constamment négociés.
Mes travaux de recherche portent actuellement sur le rôle des technologies dans la production du corps et d’une expérience corporelle genrée. J’ai mené une réflexion sur l’endométriose et à ses technologies, à partir d’une ethnographie de mon diagnostic. A la fin de l’année 2016, j’ai également entamé des recherches sur les applications de suivi des cycles menstruels.
En parallèle, je suis membre du hackerspace queer et féministe Le RESET, un espace de bidouille et d’apprentissage des technologies. Dans cet espace, je m’intéresse à la manière dont les savoirs issus des approches féministes des sciences et techniques peuvent être traduits en pratiques d’accueil, de médiation et de pédagogie.
A propos de l’autrice
Je suis actuellement ATER en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Nantes et je préside l’Observatoire des Mondes Numériques en Sciences Humaines.
Durant ces dernières années, j’ai effectué un post-doc au Département Sciences économiques et sociales de Télécom ParisTech dans le cadre d’une recherche sur le digital labor et les plateformes de micro-travail. J’ai également travaillé comme sociologue – cheffe de projet pour le Centre Expert MADoPA, sur les usages et les enjeux des gérontechnologies, à partir de différents terrains : usages du robot Paro dans des Ehpad et des unités Alzheimer, hospitalisation à domicile et système d’information, application smartphone de suivi de maladie chronique ou encore utilisation de la réalité virtuelle dans le domaine de la santé.
En 2016, j’ai soutenu une thèse de doctorat en études culturelles à l’Université Paris 1 – Panthéon Sorbonne. Ma thèse porte sur le déplacement des jeux vidéo, depuis leur contexte d’usage initial vers les espaces muséaux. Au cours d’une enquête d’un an et demi dans un centre de sciences, je me suis intéressée à la conception et aux usages d’installations interactives produites à partir d’objets techniques issus du jeu vidéo, dans un but de médiation scientifique et devant être utilisées dans un espace public. Vous trouverez ici une présentation de mon travail de thèse.
A partir de ce terrain, je me suis intéressée à la catégorisation des usages et des usager-es au cours de la conception des technologies, et la manière dont ces catégories façonnent les innovations techniques. En effet, lors de la conception des objets techniques, des identités de genre sont souvent attribuées aux usager-es imaginés par les concepteur-rices. Leurs choix produisent une distribution des rôles, des actions et des compétences entre les individus, les artefacts et l’environnement. « C’est au cours de ces histoires complexes, faites d’échecs et de réussites, d’essais et de transformations, que les objets – c’est-à-dire ces nœuds complexes de technique et de social – attrapent parfois un sexe », indique Delphine Gardey. Ces représentations de genre nourrissent les choix de design, et façonnent la matérialité et le fonctionnement des objets techniques, qui privilégient ou contraignent certaines actions. Ce terrain m’a permis d’étudier le rôle des rapports sociaux de genre et des représentations genrées dans l’usage des dispositifs de médiation et dans l’organisation sociale et matérielle de leur conception.